SABLE, fABLE

Justin Vernon n’a jamais rechigné à assumer la charge de son parcours historique et de sa trajectoire aussi rapide qu’improbable vers la célébrité mondiale. Quatre albums et 18 ans après <i>For Emma, Forever Ago</i>, Bon Iver revient avec <i>SABLE, fABLE. </i>Ce disque témoigne d’un chemin vers la paix, voire la joie, et rend hommage au travail accompli pour y parvenir. « Cet album, autant que le premier, si ce n’est plus, a été la clé de voûte de ma guérison et de ma sortie de cette période où je me sentais piégé », explique Justin Vernon à Zane Lowe d’Apple Music. Après l’annulation de la tournée prévue pour <i>i,i</i> en 2020 suite au COVID, Vernon — presque comme tout le monde — en a profité pour faire un bilan et a compris, entre autres, que partir en tournée n’était peut-être pas ce qu’il y avait de plus sain pour lui. Il a donc composé de nouveaux morceaux.

« C’était vraiment ce genre de situation où tu te dis : “Bon, je ne vais pas bien et ça n’ira pas mieux si je ne fais rien pour changer radicalement les choses et arrêter toute cette machinerie des tournées” », raconte Vernon. « C’était à la fois un certain soulagement et une immense peine de devoir dire au revoir à l’équipe qu’on avait construite. Je me suis dit : “Je vais finir ces morceaux et les sortir pour pouvoir les libérer”, parce que c’est ce dont j’avais vraiment besoin : les terminer, pour découvrir ce qu’ils contenaient. » Écrit au début du confinement, « THINGS BEHIND THINGS BEHIND THINGS » est un aperçu de cette période de solitude et de doute. Mais Vernon, avec cinq ans de recul, a le sentiment qu’il s’agit d’une chanson plus grande et plus porteuse d’espoir que cela. « À court terme, on se sent mieux, mais c’est aussi un moyen d’explorer son chagrin, sa souffrance et sa culpabilité », explique-t-il. « Je pense qu’en fin de compte, quand j’entends ce titre aujourd’hui, je me sens libéré de tout ce à quoi je faisais face avant et après l’avoir composé. Mais il faut des années pour que les choses prennent forme et pour qu’elles bougent en interne. »

À partir de là, l’album devient plus lumineux avec des titres comme « Everything Is Peaceful Love » (« Ça parle simplement de vivre le moment présent et d’essayer d’exprimer ce sentiment qui fait battre le cœur à tout rompre ») et « If Only I Could Wait », avec la voix de Danielle Haim de HAIM, que Vernon considère comme son groupe de rock américain préféré. L’album se situe entre la spontanéité de <i>For Emma, Forever Ago</i> et le maximalisme souvent énigmatique de <i>22, A Million</i> et <i>i,i</i>. C’est au cours de la longue gestation de l’album que la visibilité de Vernon a été boostée grâce à son travail avec Taylor Swift, alors même que son propre projet demeurait dans l’ombre, Vernon faisant preuve de patience et de retenue en instaurant une approche plus saine qui lui a permis de sauver sa carrière, si ce n’est sa vie.

« On est des créatures d’une beauté insensée », déclare-t-il. « Et je pense que la simplicité de cette musique m’a amené à me dire que je voulais juste la partager. Je veux que ce soit ma version de “Against the Wind” de Bob Seger. On ne va pas la cacher, on ne va pas essayer de la dissimuler derrière un rideau. On va seulement vous la donner aussi honnêtement que possible. »

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